La lactofermentation, une méthode facile à la maison, rend les légumes plus digestes et plus savoureux, faisant d’eux des alliés de notre microbiote intestinal. Yvelle Athalys-Neel*, agricultrice bio, nous explique comment la réussir à coup sûr.
Les bienfaits de la lactofermentation
À l’opposé de la mise en conserve, la lactofermentation ne détruit pas, elle crée ! C’est un processus mené par des bactéries qui transforment les sucres en acide lactique. Le terme « lacto » n’a donc aucun rapport avec le lait ou le lactose. Les bactéries lactiques « prédigèrent » les aliments lors de la fermentation, créant des enzymes et décomposant une partie des grosses molécules difficiles à assimiler par notre système digestif. La fermentation réduit les glucides ainsi que certains oligosaccharides responsables de flatulences et autres problèmes digestifs. Les aliments lactofermentés sont une source importante de probiotiques et de prébiotiques.
La fermentation augmente la valeur nutritive des aliments. Les micro-organismes créent différents nutriments tels que la vitamine C, les vitamines du groupe B (dont la fameuse B12) et la vitamine K. Elle augmente la biodisponibilité des nutriments. En effet, des études ont prouvé que le fer et le zinc étaient plus faciles à absorber dans les légumes fermentés. Elle permet en outre de neutraliser plusieurs substances toxiques comme le cyanure, les phytates et les saponines.
La lactofermentation libère également des protéines, des acides aminés et des anti-oxydants. Enfin, certaines lactofermentations produisent des arômes insoupçonnés tels que l’umami, la fameuse cinquième saveur.
La lactofermentation à coup sûr !
1. Laver préalablement les bocaux en verre simplement à l’eau claire.
N’utiliser ni javel ni liquide vaisselle. Il n’est pas non plus nécessaire de les stériliser en les faisant bouillir.
2. Utiliser un sel totalement naturel, sans iode ni anti-agglomérant.
Le sel est l’ingrédient crucial ! Il neutralise les micro-organismes pathogènes puis favorise le développement des bonnes bactéries et préserve la texture croquante des légumes. Afin d’obtenir une salinité identique à celle de l’eau de mer, il faut diluer 30 g de sel dans 1 l d’eau minérale ou filtrée.
3. Bien choisir ses légumes.
Tous les légumes, et même les fruits, peuvent être lactofermentés tant qu’ils sont comestibles crus. Bien sûr, les fruits prendront un goût salé après fermentation. Éviter la tomate, les patates, les racines, l’ail qui peut faire exploser le bocal avec la pression, car les températures élevées chez nous accélèrent la fermentation. Aussi, l’oignon qui prend un aspect pourri en fermentant. Et le sel absorbe la couleur des feuillages qui deviennent translucides.
4. Pas d’oxygène !
Rincer les légumes puis les découper en dés ou en bâtonnets. Disposer les aliments dans les bocaux en tassant au maximum ! Éviter le plus possible le passage d’air qui pourrait entraîner le développement de toxines et bactéries. Le sel et l’absence d’oxygène ralentissent la dégradation des aliments. Une fois le bocal complètement rempli, arroser de saumure jusqu’à recouvrir complètement les aliments. Les légumes doivent toujours être immergés dans la saumure.
5. Bien surveiller la fermentation pendant 3 jours.
– Fermer les bocaux et les retourner durant 4 h, posés sur une assiette creuse. Cette première étape permet simplement d’imbiber et de stériliser le couvercle avec la saumure afin qu’il ne développe aucune bactérie.
– Ensuite, remettre les bocaux à l’endroit et les disposer toute la nuit sur le comptoir de cuisine, couvercles posés, mais pas fermés, afin d’éviter le risque d’explosion.
– Le lendemain, le bocal « parle » : il peut déborder, mousser, écumer, car les enzymes ont déjà commencé à travailler. Il faudra ajouter de la saumure pour remettre à niveau ce qui aura déjà été absorbé.
– Observer durant 3 jours, car de la pression se développe dans le bocal. Une fois la magie de la lactofermentation terminée, fermer les bocaux et les conserver normalement jusqu’à 6 ans !
Comment savoir si ma fermentation est réussie ?
Le goût doit être acidulé, parfois pétillant, l’odeur légèrement vinaigrée, la saumure peut être trouble. En revanche, une lactofermentation ratée est reconnaissable à la présence de moisissures vertes, blanches, roses ou bleues à la surface et une odeur de pourriture marquée.
Astuce
Lorsque vous aurez consommé vos légumes, récupérez le liquide pour faire une vinaigrette.
* Yvelle Athalys-Neel privilégie l’association des cultures et des méthodes traditionnelles de mise en jachère depuis près de 20 ans. Elle lutte pour la sauvegarde de semences locales variées et organise régulièrement des ateliers sur l’alimentation « locavore ».
Par Barbara Keller