Accumulation d’objets, négligence de l’hygiène corporelle et domestique… sont les signes d’un syndrome de Diogène. Des conditions propices à une vie insalubre.
Qu’est-ce que le syndrome de Diogène ?
C’est un syndrome décrit en 1975 par le Dr Clark, gériatre, pour caractériser un trouble du comportement associant une tendance à l’accumulation d’objets (appelée syllogomanie), une négligence de l’hygiène corporelle et domestique, et un isolement social. Toutes ces conditions sont propices à un état dépressif, une vie insalubre et une dégradation du logement. Ce syndrome apparaît le plus souvent après un choc psychologique comme un décès ou un changement radical de situation. Il touche essentiellement les personnes âgées, des personnes qui vivent seules et surtout des femmes. La maison est alors envahie du sol au plafond par toutes sortes d’objets et détritus (papiers, journaux, boîtes, bibelots, plantes…).
Est-ce une maladie ?
C’est un trouble psycho/comportemental difficile à comprendre. Deux hypothèses existent. L’une considère ce syndrome comme une maladie psychiatrique. L’autre comme le choix d’un mode de vie et l’expression du libre arbitre à l’image de Diogène. Ce philosophe grec vivait dans une amphore couchée sur le flanc, dans le dénuement le plus total, choisissant un mode de vie à l’encontre des conventions sociales. D’un point de vue médical, le syndrome de Diogène cache souvent une maladie comme une démence de type Alzheimer ou fronto-temporale, une maladie schizophrénique ou encore une paranoïa ou un syndrome d’alcoolisme (syndrome de Korsakoff). L’approche de la personnalité révèle que ces individus ont souvent une personnalité hors norme : une intelligence au-dessus de la moyenne, un caractère fort…
Quel est le profil des personnes atteintes ?
Ce sont des personnes fragiles et vulnérables : personnes âgées, personnes traumatisées. Elles ont souvent une assise narcissique bancale et une faible estime de soi. L’accumulation d’objets peut s’expliquer par cette manie d’accorder aux objets un besoin vital, venant comme soutenir un « moi » défaillant. Les personnes souffrant du syndrome de Diogène ont ce besoin incontrôlable de cumuler, de collectionner, « d’avoir » pour renforcer « l’être ». Elles refusent bien sûr toute aide venant de l’extérieur.
Quels sont les risques ?
Tout d’abord, des risques biologiques liés à la prolifération des insectes, des saletés, et des bactéries. Puis, des risques chimiques en liaison avec des intoxications au CO2, eau souillée, alimentation avariée. L’accumulation de papiers et des autres produits combustibles augmente le risque d’incendie. Enfin, les gênes psychologiques : inconfort, troubles de l’humeur, syndrome anxio-dépressif.
Comment réagir ?
L’absence de jugement est la première posture et attitude à adopter. Un bilan psychologique et médical tentera de déceler s’il y a une maladie psychiatrique pour envisager une hospitalisation s’il s’agit d’une démence de type d’Alzheimer ou d’un trouble schizophrénique ou paranoïaque. La seule issue semble alors l’hospitalisation, même si celle-ci reste brutale. La rupture avec le domicile et avec ce mode de vie est souvent vécue comme une blessure narcissique profonde. Si aucune maladie n’est détectée, il faut respecter le choix de vie de la personne et sa liberté. En effet, si la personne jouit de sa pleine capacité de conscience, il est difficile d’intervenir. Priver un individu de son habitat, quel qu’il soit, peut avoir des conséquences graves allant parfois jusqu’au suicide. Cela montre bien l’importance du logement venant comme suppléer le « soi ».
L’emploi de la réalité virtuelle
Des chercheurs préconisent l’utilisation de casques de réalité virtuelle dans le traitement du trouble d’accumulation compulsive (syllogomanie). Le casque permet d’une part au thérapeute d’avoir accès à l’environnement réel de son patient sans avoir à se déplacer à domicile (moins envahissant pour l’individu). D’autre part, il permet au patient de trier lui-même le capharnaüm de sa maison, de jeter les objets et d’en visualiser le résultat. L’émotion suscitée lors des tâches de tri et de désencombrement en virtuel aide le patient à passer à l’action dans le réel, générant moins de détresse et d’anxiété.
Par Mandy Coubard, psychologue clinicienne