« C’est un manque de respect ! Tu es égoïste ! » Les personnes en retard ont mauvaise presse ! Ils sont perçus comme des gens qui se soucient peu des autres ! Mais est-ce vraiment le cas ?
Delphine Saint-Pol, psychologue clinicienne à Saint-François, explique que nous avons notre propre relation à la temporalité. Notre perception du temps est subjective. Les retardataires, dans certains cas, ont une vision élastique du temps : « Ils pensent qu’ils ont des super-pouvoirs et qu’ils pourront tout faire ! » Mais ce n’est pas la seule cause.
« Il n’y a pas de profil type du retardataire, et dans une existence, on n’est pas forcément tout le temps un retardataire ! » Ce qui est important, insiste la psychologue, c’est de ne pas stigmatiser ou culpabiliser, mais de se demander ce que cela nous dit de nous-même. Est-ce le signe que l’on subit un épuisement professionnel ? Est-ce la trace d’un ancien traumatisme (par ex, après un accident, on redoute le même trajet) ? Est-ce le signe d’une peur d’affronter une situation (par ex, des ados qui craignent d’aller au collège à cause de la Covid-19) ? Est-ce qu’il reflète le caractère rêveur d’une personne ou le désir de se faire remarquer par son absence ? Est-ce un problème neurologique ou encore une pression intégrée durant l’enfance ? Nos retards disent quelque chose…
1. Pourquoi suis-je en retard ?
– Besoin de contrôle. On pense, à tort, que les retardataires ne sont pas organisés. Mais le retard peut aussi être l’apanage de ceux qui cherchent à tout contrôler.
– Sensation d’adrénaline. Vouloir ressentir un stress permanent, rechercher l’excitation de dernière minute…
– Manque de confiance en soi. Se maquiller pendant des heures, changer 15 fois de tenue vestimentaire, avoir une image négative de soi…
– Stratégie de résistance. Arriver en retard pour résister à la pression sociale, dans une société qui récompense la vitesse.
– Désir de puissance. « La manipulation, forme moderne de pouvoir, se joue nécessairement au niveau temporel […]. Est prince celui qui peut se permettre de faire attendre ! », analyse Hélène L’Heuillet, psychanalyste.
– Culture. Dans certains pays, il est impensable de faire attendre les autres, alors que dans d’autres, un certain retard (mais pas trop !) est accepté et normalisé.
– Pathologie. Chez une personne qui est toujours en retard quelle que soit la situation. Par exemple, dans le cas des névroses, « l’hystérique cultive l’insatisfaction permanente, et aura toujours 5 min de retard. L’obsessionnel, lui, va procrastiner, toujours remettre à plus tard. »
2. J’arrête d’être en retard !
« Personne n’est absolument ponctuel, ou alors ce sont des personnes qui se privent de vivre l’imprévu, qui pourtant nourrit notre vie », dit la psychologue. Pourtant, les ponctuels sont mieux vus et mieux intégrés socialement. Cela évite les petites disputes et surtout montre aux autres qu’ils sont aussi importants que nous.
Quelques pistes.
– Prendre conscience des torts causés : « Quelles conséquences mon retard aura sur l’organisation des autres ? »
– Se mettre à la place de l’autre : « Comment, à mon tour, je gère le retard des autres ? »
– Être à l’écoute de ses émotions : « Qu’est-ce que je ressens lorsque je suis en retard ? »
– Apprendre à gérer son temps : afficher son emploi du temps, faire des tableaux.
– Ne pas sous-estimer le temps que va prendre une tâche : se chronométrer.
– Se fixer des objectifs simples : décomposer les étapes.
– Anticiper : se préparer la veille pour le lendemain.
– Demander l’aide d’un thérapeute.
Par Jenny Ronel