Depuis la création du Traditour, compétition de voile traditionnelle, les évolutions sont nombreuses et beaucoup de compétiteurs portent désormais une attention particulière à leur forme physique et mentale d’avant course.
Elle est lointaine, l’époque où les marins s’affrontaient sur l’eau avec insouciance, sans notion scientifique de préparation. Carl Chipotel, président de l’Association nautique de Sainte-Anne (Anasa), peut en témoigner. À la fois organisateur du Traditour et patron du canot Bred/FDJ, il a été aux premières loges pour voir évoluer l’importance de la préparation physique et mentale des coursiers.
© Eddy Barny
Dans son équipage, la saison débute dès janvier. « Notre préparation comporte deux dimensions, physique et mentale », confie le patron de canot. « Nous axons le travail sur l’endurance et l’explosivité des groupes musculaires sollicités lors des efforts en course », ajoute-il. Les séquences hebdomadaires sont dirigées par Jérémy, leur coach sportif. La dimension psychologique, elle, constitue le « moteur de la synergie du groupe ». La promiscuité sur le canot exige une cohésion de groupe sans faille. Car, la moindre « erreur d’un équipier a un impact sur tous les autres ». Aussi, l’équipe partage des temps de détente. « Je navigue avec des amis », se réjouit Carl.
Mental d’acier
Équipage Ti Bijou/Eurogold, 100 % féminin ! © Denis Guyeanon
Du côté de la MJC du Gosier, camp d’entraînement de Ti Bijou/Eurogold, c’est aussi une ambiance bon enfant qui règne. « Il y a une énorme solidarité entre les filles. Elles s’encouragent sans pudeur. Les liens sont forts », affirme Clémentine Vauchel-Camus. L’éducatrice sportive suit cet équipage 100 % féminin depuis 3 ans.
À raison de deux séances hebdomadaires, la coach prépare les compétitrices aux dures conditions du Traditour. « Elles doivent tenir des positions inconfortables durant des heures, porter du matériel lourd. Donc on travaille beaucoup les muscles profonds. » Mais Clémentine accorde aussi une place importante à la préparation mentale. Dans ses séances, figurent toujours des jeux favorisant l’entraide. L’éducatrice explique qu’ « à partir du moment où on est poussé dans ses retranchements, la fatigue provoque un décrochage. Cela fait remonter des fragilités, des séquelles éventuelles ». Et d’ajouter : « là, le mental joue à 90 % ».
Niveau d’exigence élevé
« On n’est pas dans une course de quartier, mais dans une vraie épreuve physique et mentale. On n’arrive pas la fleur au fusil ! » Directeur de course du Traditour, Victor Jean-Noël sait combien la préparation du corps et de l’esprit à ce défi sportif est primordiale. « Nous avons un groupe WhatsApp pour échanger avec tous les patrons de canots. » Le réseau social permet de diffuser des informations sur les conduites à tenir. « On insiste sur tous les aspects : suivi médical, hydratation et alimentation », indique le directeur.
Marc Forbin, patron du canot Vito, l’a appris à ses dépens. « On a toujours eu de super bateaux, donc on n’était pas obligés d’être à 100 % physiquement », se souvient-il. Mais quand des skippers aguerris aux courses au large s’intéressent à la voile traditionnelle, le niveau d’exigence s’élève et Marc réalise le « manque d’endurance » de son équipage. Depuis, instauration de vraies séances de préparation physique, recrutement d’un triathlète pour les encadrer. De son propre aveu, « c’est le jour et la nuit ! ». Marc « remet les pendules à l’heure » et prévoit même de s’attacher les services d’un kiné préparateur sportif.
Chez Kraché difé (Groupe Gaddarkhan), au cours des 4 dernières années, l’équipage du patron Dimitri Flandrina n’a pas lésiné sur les moyens. Il s’est tour à tour attaché les services d’une diététicienne, d’un préparateur physique, d’un kinésithérapeute, d’une ostéopathe et optimise sa récupération avec des séances de cryothérapie. Pour Dimitri, « le niveau est élevé et exigeant. Il nous appartient de relever ce défi physique ».
Le Traditour 2023 se déroule du 8 au 15 juillet. Cette année, ce sont 10 étapes en 8 jours qui attendent les sportifs.
Par Boni Kwaku