Mal connu, négligé par la médecine, le clitoris, cet organe féminin uniquement dédié au plaisir est en train de faire son coming out... Pour notre plus grand bien.
Révolution dans les manuels scolaires 2017-2018 ! Pour la première fois, le clitoris apparaît entièrement et correctement dessiné dans une planche anatomique. Le nouveau manuel de Science de la vie et de la terre (SVT) destiné aux élèves de 4e, montre enfin l’exemple. Aussi incroyable que cela puisse paraître, les autres manuels ne le représentent pas, ou comme un haricot…. ce qui n’a rien à voir avec sa forme réelle !
11 cm
Le clitoris serait-il en train de sortir de l’ombre où la médecine occidentale l’a négligemment oublié depuis au moins 1 siècle ? C’est ce qu’espèrent de nombreux militants féministes, chercheurs et médecins, comme Odile Fillod. Cette chercheuse indépendante a mis en ligne un fichier permettant d’imprimer un clitoris en 3D. Elle espère que les professeurs s’en serviront en cours, pour que les jeunes, filles et garçons, apprennent à mieux connaître le corps féminin. L’objet qu’elle propose d’imprimer et de peindre pour lui donner une apparence plus proche de la réalité, peut surprendre. Il est en grandeur nature et mesure… 11 cm !
« Le clitoris est un organe de l’appareil génital externe de la femme que l’on observe à la partie avant de la vulve, au point de rencontre des deux petites lèvres, explique Marie-Christine Céraline, sage-femme en Martinique. En écartant les petites lèvres, on ne voit que le « capuchon » ou le « gland » du clitoris : un organe sensible, érectile de 2 à 3 cm et fin comme une tige de fleur. Mais il a des racines internes. » Le clitoris se prolonge à l’intérieur du bassin par deux ailes qui se déploient sur environ 10 cm autour du vagin. On peut les sentir en appuyant vers le milieu de la vulve en direction de l’os du pubis. L’existence de ces ailes, souvent ignorée, explique beaucoup de soi-disant « mystères » du plaisir féminin.
Elle explique, par exemple, pourquoi la distinction entre « femme vaginale » et « femme clitoridienne » n’a pas de sens, puisque le clitoris est également présent au niveau du vagin. Elle explique également pourquoi l’excision, qui consiste à couper le gland du clitoris, n’empêche pas une femme d’avoir du plaisir (elle n’ôte qu’un dixième du clitoris). La reconstruction clitoridienne des femmes excisées consiste d’ailleurs à déplacer une partie des ailes du clitoris pour la faire ressortir au sommet de la vulve et occuper la place du gland coupé.
Organe du plaisir
« Gland », « hampe », « frein »… le clitoris ressemble beaucoup à la verge masculine. Ces deux organes sont d’ailleurs issus des mêmes tissus embryonnaires. Ils ne commencent à se différencier qu’à la fin du troisième mois de grossesse. Cette différenciation est d’ailleurs inégale selon les individus. De la même manière que les verges sont plus ou moins développées, les clitoris sont plus ou moins proéminents. Dans 1 à 4 % des naissances, il est même difficile de savoir si l’on a affaire à une verge ou à un clitoris. L’enfant est intersexué.
Les points communs entre le clitoris et la verge ne s’arrêtent pas à leur origine. Ils fonctionnent de manière assez semblable lors de la relation sexuelle. Le clitoris est richement innervé (par environ 8 000 terminaisons nerveuses) et réagit aux caresses. Lors de l’excitation, les corps caverneux du clitoris (semblables à ceux de la verge), se gonflent de sang et le clitoris se redresse. Il entre en érection ! Mais contrairement à la verge, qui non seulement a une fonction dans le plaisir mais également dans la reproduction et dans la miction, le clitoris est, lui, entièrement consacré au plaisir.
Et c’est sans doute ce qui lui a valu d’être mis au placard pendant tant d’années. Le clitoris est en effet connu depuis longtemps. On en trouve même des descriptions dans des traités de Grèce antique. Mais à partir du 19e siècle, quand les médecins comprennent qu’il ne joue aucun rôle dans la procréation, il est négligé. Sigmund Freud, le fondateur de la psychanalyse, largement participe à cet enterrement. Car pour lui, le plaisir clitoridien est un plaisir de petite fille, immature, auquel doit succéder uniquement le plaisir vaginal de la femme adulte lors de la pénétration. Dès lors, le clitoris occupe une place de plus en plus petite dans les cours de médecine et les planches anatomiques. Jusqu’à quasiment disparaître dans les années 1960.
83 %
Résultat, aujourd’hui, cet organe est aussi mal connu des femmes que des hommes. Selon un rapport sur l’éducation sexuelle remis en juin 2016 par le Haut conseil à l’égalité (HCE), un quart des filles de 15 ans ne savent pas qu’elles ont un clitoris, et 83 % des collégiennes de 4e et de 3e ignorent sa fonction. Des statistiques qui devraient désormais bouger. Même si le programme de collège n’impose pas aux professeurs d’en parler, les élèves ne manqueront pas d’observer ce nouveau venu sur les planches anatomiques. On attend cependant que les autres éditeurs suivent… et se décident à mentionner un autre oublié de l’anatomie féminine : l’hymen.