L’adolescence est considérée comme une étape développementale nécessaire : transition entre l’enfance et l’âge adulte. L’ado a besoin d’exprimer sa colère. S’y confronter est le but de cette crise identitaire.
« Je ne comprends pas le comportement de mon fils de 12 ans, il se rebelle contre la terre entière ! Il est en colère pour tout, contre tout et surtout envers nous, sa famille. Je ne sais plus quoi faire ! », raconte une mère inquiète. Tous les jours, des adolescents, envahis par la colère, consultent des psys car ils ne savent pas comment l’exprimer. Et les parents sont souvent désarmés.
Émotion forte
La colère fait partie de la palette émotionnelle de l’être humain. Émotion forte souvent perçue comme négative, elle est pourtant le reflet de l’affirmation de soi. La colère vise un bénéfice de bien-être et d’équilibre psychologique : la défense de soi si nous nous sentons menacés. Elle est aussi un carburant essentiel pour modifier ce que nous considérons comme injuste ou illégitime. La colère est connue et ressentie par tous. Nous essayons toute notre vie de composer avec elle afin de ne pas perdre notre self-control : prise de recul, éviter les réactions impulsives « à chaud » menant à la violence, à l’agressivité ou à des comportements inadaptés.
Particulièrement, l’adolescence sert d’exercice pour accepter la frustration et la maîtrise des pulsions primitives. Le tout n’est pas d’éviter la colère car on ne peut pas la contrôler mais d’apprendre à l’apprivoiser, à l’accepter pour ne pas se sentir débordé par elle. La considérer comme utile et universelle modifie déjà le rapport que l’on peut avoir avec cette émotion.
Confrontation avec les parents
L’adolescence est une crise identitaire avec un besoin d’affirmation de soi, où les premiers questionnements existentiels s’imposent : qui suis-je ? Que vais-je faire de ma vie ? Quel adulte vais-je devenir ? La colère de l’adolescent est souvent légitime. Il recherche la confrontation pour revendiquer sa personnalité. Le plus souvent la rébellion est sociale ou sociétale : confrontation avec des professeurs, des amis (inclusion/exclusion de différents groupes, rejet du système, choix vestimentaire). Il quitte l’innocence de l’enfance pour accéder à une nouvelle réalité, pas si simple pour lui, comme le fait de devoir faire des choix d’orientation scolaire ou professionnelle.
La colère est souvent hétéro-agressive visant les parents car l’adolescent a besoin de s’affirmer au sein de la cellule familiale. Il existe un bénéfice secondaire à cette colère, qui rassurera sans doute les parents inquiets, c’est « le processus naturel d’autonomisation ». N’oublions pas que l’adolescent est un être en devenir, un adulte en préparation. De ce fait, la colère l’aide et le pousse à se couper de la sphère affective rassurante du cocon familial, lui permettant de s’affirmer en tant qu’individu.
Faire valoir sa parole
Comment l’aider à exprimer sa colère ? En lui offrant un espace de parole. Privilégiez des moments de discussions afin qu’il puisse mettre des mots sur ses maux. L’adolescent apprendra à discuter avec les adultes, à communiquer, à débattre de sujets divers. C’est à travers la résolution des conflits familiaux qu’il s’entraîne à résoudre des futurs conflits relationnels. S’il est entendu, il n’aura plus besoin de hurler, de se défendre ou de se confronter.
Écoutez ce qu’il a à dire, faites valoir sa parole, essayez de ne pas l’infantiliser, même s’il aura toujours besoin de la guidance parentale. L’adolescent doit apprendre le sens des responsabilités, avec un réel besoin d’autonomie. Le mieux à faire pour aider un adolescent à exprimer sa colère c’est de l’entendre et de la comprendre. Non pas comme quelque chose de négatif mais plutôt comme une étape faisant partie de l’apprentissage de la vie ! Autrement dit, un adolescent qui verbalise est un adolescent qui va bien. Celui qui ne peut pas dire, à qui on réprime la parole, reportera la résolution de ses conflits intérieurs, par l’expression de comportements inadaptés (violence, vols, fugues…) ou bien refoulera sa colère. Elle ressurgira très certainement à l’âge adulte par le biais d’autres crises identitaires. « Tout ce qu’on refoule finit par refaire surface avec débordement », disait Claudia Rainville, psychothérapeute.
Il y a des limites !
On ne peut pas tout permettre ni tout accepter ! Le respect envers les parents est primordial ! L’adolescent a besoin d’un encadrement parental et il doit accepter la réalité des limites qui lui sont imposées. Il faut donc jongler entre liberté et autorité. Quand il franchit la ligne, n’ayez pas peur de la confrontation. Expliquez-lui que vous êtes le garant de son éducation et de sa sécurité. Si la colère peut être positive, elle peut aussi être pathologique. Il peut exister des troubles graves du comportement, violences hétéro ou auto-agressives, troubles de la personnalité. N’hésitez pas à demander l’avis d’un spécialiste en cas de doute.
Par Mandy Coubard,
psychologue clinicienne.