Douleur, raideur, handicap, moral bas, qualité de vie altérée… Le chikungunya peut engendrer des souffrances des années après. Pour améliorer la prise en charge de dizaines de milliers de patients est né le parcours Chik-tambouyé. Interview du Pr Franciane Gane-Troplent.
Qu'est-ce que le projet Chik-tambouyé 51 ?
Ce projet a été créé pour améliorer la prise en charge en ville des patients souffrant d’un chikungunya chronique. Au fil des années, après le chikungunya, la vie des patients est altérée par les douleurs, la fatigue, des baisses de moral, une prise de poids et des difficultés à la maison ou au travail. Sans oublier parfois le désarroi de se sentir abandonné par le corps médical. La solution apportée par le programme Chik-tambouyé 51 consiste en la réalisation d’informations et d’actions innovantes en direction du grand public et des professionnels de santé de l’archipel de la Guadeloupe. Il est axé sur l’organisation d’une filière régionale dédiée à la prise en charge des patients.
Qu’est-ce que le chikungunya chronique ?
Le chikungunya est une maladie due à un virus, le CHIKV, transmis par certains moustiques, implantés dans de nombreuses régions du monde. On parle de chikungunya chronique quand les symptômes durent plus de 3 mois. Le virus provoque un tableau brutal de fièvre et de douleurs intenses.
De très nombreux adultes ont continué et continuent encore à souffrir de douleurs articulaires et tendineuses, de fatigue, avec un retentissement sur le moral et sur la vie quotidienne. Plus précisément, les manifestations articulaires chroniques sont dues à la persistance d’une inflammation des régions articulaires, très souvent dans les mains, les poignets, les pieds et les chevilles, puis les épaules. Dans près de 98 % des cas, il s’agit de troubles musculo-squelettiques (tendinites, contractures…) qui créent des raideurs aux articulations sans les détruire et sont réversibles avec des traitements simples. Un petit nombre de patients nécessite un traitement spécialisé après avoir développé un rhumatisme inflammatoire chronique avec risque de destruction articulaire.
En quoi Chik-tambouyé 51 est-il un projet innovant ?
Parce qu’il propose enfin aux patients un parcours de soins spécifiques en ville, leur permettant d’être pris en charge en même temps par différents spécialistes : médecins, kinésithérapeutes, infirmiers, psychologues, diététiciens, éducateurs en activité physique adaptée… C’est la première fois dans le monde qu’une telle filière est développée pour le chikungunya chronique.
En pratique, comment se déroulera la prise en charge ?
Chaque patient suivra une série de consultations pluridisciplinaires sur le site de la Maison de santé pluriprofessionnelle universitaire des Abymes. Dès la première consultation, le patient est pris en charge par un médecin référent. Et aussi par un kinésithérapeute, un psychologue, un éducateur en activités physiques, un diététicien et une infirmière. Ainsi, pour chaque patient, sera établi un programme de soins personnalisé avec une prescription médicale adaptée, une information sur la maladie, une rééducation et une réadaptation à l’effort. Le suivi sera assuré en cinq consultations réparties sur 2 ans. Ces consultations sont prises en charge par l’Assurance maladie.