Pas vraiment scolaires, plutôt destinées à éveiller, les classes de Toute petite section (TPS) sont peuplées d’élèves en devenir. Le point sur ces classes en Guadeloupe avec Stéphanie, professeure des écoles.
« Un jour, une tractopelle est venue travailler sous nos fenêtres. Nous l’avons observée pendant 15 min. Nous avions, dans la classe, un jouet en forme de camion à benne ainsi qu’une pelle mécanique. À partir de cette observation, les enfants se sont mis à reproduire ce qu’ils avaient vu. C’est l’école de la vie », raconte Stéphanie, qui a exercé pendant 5 ans en TPS. L’année entre 2 et 3 ans est une étape particulière pour l’évolution des enfants. L’acquisition du langage, l’ouverture au monde, la motricité globale et fine sont les éléments clefs de cette période.
Réduire les inégalités
Les classes de TPS existent en Guadeloupe depuis 2013. L’accueil des enfants de moins de 3 ans s’est inscrit en priorité dans le projet national de refondation de l’école, initié en 2012. Ce développement s’est notamment ouvert aux milieux dits défavorisés afin de réduire les inégalités et constituer, pour les enfants, une première expérience éducative en collectivité. Avant cette création officielle, l’accueil des enfants en bas âge se faisait déjà, mais ils étaient le plus souvent intégrés dans les classes de petites sections.
Mieux préparés
En TPS, il n’y a pas de journée type. « En arrivant le matin, l’enfant va où il veut. Un tableau et un chevalet sont à disposition. L’enfant peut commencer par s’exprimer à l’aide de craies, de feutres, de peinture. On veille à respecter le rythme des tout-petits. Je faisais mes programmations pour la semaine, mais on se réadaptait sans cesse », confie Stéphanie, passionnée. Il règne « un joyeux bazar mais avec un cadre pour les activités. Les enfants ne sont pas tous assis. L’un est couché, car il est fatigué, tandis que les autres sont en atelier peinture. »
Libres
À Goyave où elle a exercé, Stéphanie avait accès à une grande salle de classe. Il n’y avait pas de portes entre les salles de repos, de classe et de douche. Les enfants pouvaient aller de l’une à l’autre en tricycle ou en petit camion, libres de leurs mouvements. « J’étais beaucoup par terre, pieds nus, on faisait de la relaxation, on avait un petit bout de jardin. » Il n’y a pas d’horaires obligatoires même si, très vite, les enfants viennent toute la journée. La classe est ouverte aux familles qui sont conviées à des rendez-vous individuels tous les semestres. Si certains y voient au début le fait d’économiser une année de crèche, les parents prennent ensuite conscience de l’impact positif que la classe a sur leurs enfants. « En passant par la TPS, les enfants sont davantage préparés à entrer à l’école », reprend Stéphanie.
Pas autonomes
À la création, ce sont 28 classes qui se sont ouvertes sur l’ensemble du territoire guadeloupéen grâce à la vive impulsion d’une chargée de mission maternelle du rectorat. Elle avait le souhait de former les enseignants à des classes bienveillantes « et que ça se répercute sur les autres classes ». L’ouverture d’une TPS se fait en accord avec les municipalités, car il y a un cahier des charges à respecter : salle de repos attenante à la salle de classe, salle de douche, jardin. Chaque classe est composée d’un maximum de 20 élèves pour un professeur des écoles et une Atsem (Agent territorial spécialisé des écoles maternelles). La mission est plus spécifique en ce qu’elle implique de s’adapter à des enfants qui ne sont pas encore complètement autonomes.
Formation intensive
Enseigner dans ces classes n’est donc pas plus facile et les personnes recrutées sont formées, motivées et volontaires. Chaque futur enseignant de TPS reçoit une formation intensive de ¾ jours au mois de juin. Il suit ensuite des modules tout au long de l’année avec des professeurs des écoles comme Stéphanie, qui travaillent depuis plusieurs années dans ce type de classe, afin de bénéficier d’un vrai retour d’expérience.
Par Bérengère Merlot