Meg Ryan est très convaincante dans la célèbre scène d’orgasme simulé du film Quand Harry rencontre Sally. Mais est-il nécessaire de simuler pour donner du plaisir à l’autre ? Est-ce un plus dans le couple ? Réponses avec Véronique Lucas, sexologue-sexothérapeute.
Qu’est-ce qu’un orgasme ?
C’est une vague de plaisir incontrôlée, un tsunami qui nous fait perdre la notion de soi, la notion du corps. C’est une sensation d’excitation intense, le point culminant du plaisir sexuel. C’est, en quelque sorte, le paroxysme du plaisir.
Pour autant, l’orgasme est-il le baromètre d’un rapport sexuel réussi ?
Non, avoir un orgasme n’est, fort heureusement, pas obligatoire. Un rapport sexuel peut très bien se vivre dans le plaisir, sans pour autant aller jusqu’à l’orgasme. Nous pouvons ressentir des plaisirs variables, un état relaxant, sans que l’orgasme ne se déclenche. Les hommes particulièrement, sont souvent dans l’idée que s’il n’y a pas d’orgasme, il n’y a pas de plaisir. Ils se sentent atteints dans leur virilité et dans leurs compétences d’amants… Les médias aussi véhiculent cette idée. L’être humain n’est pas un robot : les orgasmes ne se déclenchent pas à chaque fois, d’autant qu’il existe plusieurs types d’orgasmes, tels que : l’orgasme clitoridien plus en surface, les orgasmes vaginaux, différemment ressentis en fonction du partenaire, ainsi que les orgasmes de la zone anale, le point G…
C’est cette dictature de l’orgasme qui pousse à simuler ?
Effectivement, une bonne partie des femmes simulent. Certaines patientes me demandent : « Je n’ai pas d’orgasme, suis-je normale ? ». Il est vrai que, bien souvent, les messages et comportements masculins sont très durs, parfois culpabilisants envers leur partenaire. C’est donc souvent pour éviter ce genre de propos que les femmes simulent. D’autres raisons poussent certaines femmes à cela. Souvent, c’est pour raccourcir le rapport sexuel parce qu’elles s’y ennuient (un orgasme mettant fin à l’acte sexuel, elles écourtent le rapport). Ou bien, elles « miment » pour faire plaisir à leur partenaire, évitant les questions et remarques désobligeantes. J’ai pu constater que certaines femmes simulent tout au long de leur vie ; d’autres femmes, suite à dix à quinze ans et plus de vie maritale me confient que leur sexualité s’étiole, leur libido est en « berne » et donc, elles accomplissent le « devoir conjugal » sans véritable plaisir, sans satisfaction particulière…
Faut-il simuler ?
J’aurais tendance à dire non. C’est se mentir à soi-même, ne pas être sincère avec l’autre. Simuler indique une chose essentielle : que l’on n’a pas une bonne communication avec son partenaire. Pour vivre pleinement sa sexualité, communiquons, et ce, dès le départ de la vie de couple. Je note que les jeunes générations sont plus ouvertes que leurs parents, ont moins de tabous, parlent et s’expriment réellement plus aisément sur le sujet. Ils savent fort bien que sur internet, toute la procédure pour simuler un orgasme est décrite (exemples : l’orgasme n’est pas crédible s’il arrive trop vite, haletez avec force, griffez mais ne mordez pas… ndlr). Ils en rigolent d’ailleurs ! C’est bien, ils sont décontractés sur ce thème et donc apportent une meilleure expression à leur sensualité et sexualité.
Comment en parler à son partenaire ?
Simplement en étant sincère, en expliquant : « Je n’ai pas eu d’orgasme, j’ai eu du plaisir. » Il est important de s’exprimer naturellement sur son ressenti, expliquer que l’orgasme n’est pas systématique, que certains paramètres jouent sur notre implication : notre humeur, une réflexion, un partenaire trop pressant, des conditions familiales, la nervosité, etc. Parler à son partenaire, ce n’est pas forcément pour le blesser. Qui plus est, certains hommes ne sont pas dupes et finissent par se rendre compte que leur femme simule. Quand un homme connaît bien sa partenaire, il sait quand elle a, ou pas, un orgasme. Un orgasme se définit par des contractions, des respirations fortes, haletantes, des crispations du visage, des cris, les corps se tendent… pas toujours facile à imiter.
Les hommes simulent-ils ?
Selon les statistiques, trois quarts des femmes simulent. Elles ne sont pas les seules, les hommes aussi ! Ils seraient un quart à simuler (toujours selon les statistiques). C’est plus difficile pour eux, mais tout à fait réalisable. Un homme peut tout à fait éjaculer sans avoir de plaisir. Les hommes peuvent d’ailleurs jouir sans éjaculer car ces deux événements sont en fait dissociés.
L’orgasme est-il plus difficile à atteindre pour la femme ?
Oui. Notre appareil génital est totalement différent. Aussi, beaucoup d’hommes tâtonnent dans la compréhension du plaisir féminin et de son anatomie. Aussi, la femme peut guider son partenaire, afin de mieux l’instruire sur ses besoins, envies, voire fantasmes… Cela ne doit pas remettre en question la virilité, ni la sexualité de l’homme qui doit accepter cela comme une information pour parfaire sa « technicité » d’amant. S’ouvrir à sa partenaire, apprendre à donner et recevoir, est d’autant plus appréciable et apprécié que les femmes ont toutes des ressentis différents dans le plaisir. Ce qui plaît à l’une ne plaît pas forcément à l’autre. Se remettre en question régulièrement, booster sa libido, communiquer autour de l’intimité du couple avec son partenaire, sont des moyens essentiels ou protocoles indispensables pour un rapport sexuel réussi.
MSR (nov 2011)