« Évitez de manger trop gras, trop sucré, trop salé. » Plus facile à dire qu’à faire ! Voici 5 pistes pour en comprendre les causes.
1. Une question de survie
Et si nos comportements alimentaires étaient dictés par d’autres facteurs ? Retour à l’ère de Néandertal : se nourrir est d’abord un instinct de survie. Privilégier les aliments les plus caloriques serait un réflexe inconscient de faire des réserves, au cas où la nourriture viendrait à manquer. « Le gras et le sucre apportent énormément d’énergie, mobilisable rapidement. Le goût salé, par exemple, indique qu’un aliment comporte des minéraux dont notre corps a besoin. En réalité, le goût d’un aliment reflète son contenu nutritionnel », explique Élisabeth Barthe, diététicienne-nutritionniste.
2. La faute au cerveau
En 2018, une étude américaine* observe que notre cerveau libère de la dopamine lorsque nous mangeons des aliments gras et sucrés. Appelée aussi hormone du bonheur, la dopamine est associée directement au plaisir. Dans le cas des aliments gras et sucrés à la fois, elle fait appel au « circuit de la récompense » situé dans une partie de notre cerveau. Cette sensation agréable est alors mémorisée. Et nous cherchons à revivre ce plaisir immédiat, parfois jusqu’à la dépendance. Les aliments en cause ne sont plus reliés par la faim, mais agissent comme des doudous. En cas d’émotions fortes, par exemple, ils nous apaisent.
Les recommandations d’Élisabeth Barthe
Devons-nous bannir ces aliments ? « Nous avons besoin de tous ces nutriments. C’est l’excès qui est nocif. À l’opposé, certaines graisses ne sont pas consommées suffisamment. Celles contenant de l’oméga-3, par exemple, alors qu’elles sont anti-inflammatoires, permettent le bon fonctionnement de notre cerveau, protègent des maladies cardiovasculaires, etc. » Envie de gras ? Tournez-vous plutôt vers les fruits à coques (amandes, noix de cajou, etc.), les poissons gras ou les avocats. En prévenant les fringales de sucre (pour tromper le cerveau), ajoutez des « glucides complexes » à vos repas (légumineuses, légumes racines et fruits). Enfin, sachez que l’OMS recommande un peu moins d’une cuillerée à café de sel… par jour !
3. Une texture agréable
« La palatabilité entre également en jeu. Ces aliments sont agréables à consommer », indique Élisabeth Barthe. La « palatabilité » caractérise la texture des aliments agréables au palais. Les aliments gras, salés et sucrés sont souvent doux et onctueux dans la bouche. Ils augmentent le plaisir alimentaire. L’ennui avec les aliments défendus, c’est qu’ils sont fréquemment palatables.
4. Des goûts peu diversifiés
« Chez beaucoup de personnes, le goût n’est pas assez développé. En cause, la surconsommation de plats préparés, ou de produits gras, sucrés et salés en fast-food. Ces habitudes alimentaires conduisent à une alimentation peu diversifiée », déplore la nutritionniste. Hélas, une enquête a démontré que les industries agro-alimentaires satureraient les produits de sucres, de sel (un exhausteur de goût) et de matières grasses, afin de nous rendre dépendants dès le plus jeune âge**.
5. Le poids du marketing
L’exposition d’aliments gras, sucrés et salés à la publicité augmente leur consommation, en particulier chez les enfants et les jeunes. En 2020, Santé publique France a même préconisé de limiter les communications commerciales de produits à faible qualité nutritionnelle (Nutri-Score D et E) à la télévision et sur internet, durant les tranches horaires les plus regardées par les enfants.
* Revue Cell Metabolism.
Pour aller plus loin : Sucre, sel et matières grasses, comment les industriels nous rendent accros, Michael Moss, Calmann-Lévy, 2014.
Qui mange quoi ?
« En Martinique comme en Guadeloupe, les préférences déclarées pour le sucré, le gras et le salé sont supérieures chez les hommes, et décroissent avec l’âge. Ce constat rejoindrait celui de la France hexagonale (étude EpiPref, 2010). »
Source : Facteurs associés aux préférences sensorielles pour le gras, le salé et le sucré, Pascal Schlich, séminaire Nutwind, Guadeloupe, 28 avril 2022.
Par Céline Guillaume